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mardi 15 juillet 2014
Par François Freby
Il s’agissait de constituer un groupement de poèmes qu’il serait possible d’intituler, pour reprendre les termes de l’objet d’étude, « Écriture poétique et quête du sens de la solitude ».
Synthèse mise en ligne par Murielle Taïeb.
XVIIe siècle
► BEDOUT G., « La solitude amoureuse »
Poète gascon (1617-1692).
► DONNE J., Poèmes
Celui qui se trouve en exergue du roman Pour qui sonne le glas.
► LA FONTAINE J. de, « Le rat qui s’est retiré du monde », Fables, Livre VII, fable 3, 1668.
Solitude stratégique d’un Tartuffe : « La solitude était profonde, / S’étendant partout à la ronde. / Notre ermite nouveau subsistait là -dedans. [...] Il devint gros et gras ; Dieu prodigue ses biens / A ceux qui font vÅ“u d’être siens. »
► LA FONTAINE J. de, « Le songe d’un habitant du Mogol », Fables, Livre XI, fable 4, 1678.
Otium, « amour de la retraite ».
► SAINT-AMANT M.A. de, « La Solitude », Å’uvres, 1617
Amour de la solitude : « O ! que j’aime la solitude ! / Que ces lieux sacrés à la nuit, / Éloignés du monde et du bruit, / Plaisent à mon inquiétude ! / Mon Dieu ! Que mes yeux sont contents / De voir ces bois qui se trouvèrent / A la nativité du temps, / Et que tous les Siècles révèrent, / Être encore aussi beaux et verts, / Qu’aux premiers jours de l’Univers ! » Mais cet hymne à la Nature solitaire s’achève par une strophe-chute galante : « O que j’aime la solitude ! / C’est l’élément des bons esprits, / C’est par elle que j’ai compris / L’art d’Apollon sans nulle étude. / Je l’aime pour l’amour de toi, / Connaissant que ton humeur l’aime / Mais quand je pense bien à moi, / Je la hais pour la raison même / Car elle pourrait me ravir / L’heur de te voir et te servir. »
► VIAU Th. de, « La Solitude ».
Ce « val solitaire et sombre », lieu idyllique pour des ébats amoureux avec « Corine » : « Ici l’amour fait ses études, / Vénus dresse des autels, / Et les visites des mortels / Ne troublent point ces solitudes. »
XIXe siècle
► ARVERS F., « Mon âme a son secret »
Mis en musique par Gainsbourg, un amour inavoué : « Hélas ! j’aurai passé près d’elle inaperçu, / Toujours à ses côtés, et pourtant solitaire. / Et j’aurai jusqu’au bout fait mon temps sur la terre, / N’osant rien demander et n’ayant rien reçu. »
► BAUDELAIRE Ch., « Recueillement », Les Fleurs du Mal, 1857.
Le poète s’adresse à sa douleur, et donc à lui-même pour s’apaiser. Une solitude thérapeutique ? « Sois sage, ô ma Douleur [...] Pendant que des mortels la multitude vile, [...] Va cueillir des remords dans la fête servile, / Ma Douleur, donne-moi la main ; viens par ici, / Loin d’eux. »
► BAUDELAIRE Ch., « La Solitude », Petits Poèmes en prose, 1869.
Apologie condescendante d’une solitude recherchée par « les amoureux de la solitude et du mystère » et propice à la création, offrant les « voluptés [...] du silence et du recueillement ». Une satire antithétique frappe les « races jacassières ».
► HUGO V., « Soleils couchants », Les Feuilles d’automne, 1831.
Solitude de celui qui meurt : « Je m’en irai bientôt, au milieu de la fête, / Sans que rien manque au monde immense et radieux ! »
► HUGO V., « Demain, dès l’aube... », Les Contemplations, 1856.
Solitude d’un père qui a perdu sa fille : « Seul, inconnu, le dos courbé, les mains croisées, / Triste, et le jour pour moi sera comme la nuit. [...] Et quand j’arriverai, je mettrai sur ta tombe / Un bouquet de houx vert et de bruyère en fleur. »
► LAMARTINE A. de, « L’isolement », Méditations poétiques, 1820.
Désespoir, indifférence à tout, de l’amoureux abandonné (en l’occurrence, perte de la femme aimée qui est morte) : « Un seul être vous manque, et tout est dépeuplé ! »
► LAFORGUE J., « Spleen », Poèmes inédits, 1880.
DésÅ“uvrement vaguement décadent. « Seul, je ne puis dormir et je m’ennuie encor. »
► MALLARME S., « Brise Marine », Poésies, 1865.
Solitude-Ennui. « La chair est triste, hélas ! et j’ai lu tous les livres. / Fuir ! là -bas fuir ! »
► MUSSET A. de, Nuit de décembre, 1835.
Allégorie qui tient en haleine jusqu’au bout : « Ami, je suis la Solitude. » Musset revisite son passé d’enfant, d’adolescent et d’amant trahi. Il y réveille les fantômes d’un double étrange et complice « qui [lui] ressemblait comme un frère ».
► O’NEDDY Ph., « Spleen », Feu et flamme, 1829.
Le poète touché par le spleen subit une solitude profonde qui peut confiner au sentiment de l’exil dans un monde étranger voire hostile. « Ah ! pleure mais tout bas, de peur que l’ironie / De misère et d’orgueil n’accuse ton génie. / Et point d’amis encore ! Il te faut pleurer seul. »
XXe siècle
► BARBARA, « La Solitude », 1965.
La chanteuse évoque un personnage féminin qui l’accompagne partout et la harcèle. On découvre à la fin qu’il s’agit d’une allégorie de la solitude. « Allez, va-t-en porter ailleurs / Ta triste gueule de l’ennui. / Je n’ai pas le goût du malheur. / Va-t-en voir ailleurs si j’y suis ! »
► BERGER M., « La groupie du pianiste », 1980.
L’enfer, c’est d’être seul(e) sur terre, sans l’être aimé : « Elle le suivrait jusqu’en enfer / Et même l’enfer c’est pas grand-chose / À côté d’être seule sur terre / Et elle y pense dans son lit / Le soir entre ses draps roses. »
► BREL J., « Une île », album Les Bourgeois, 1962.
Amour-tendresse-solitude à deux ; la solitude à deux est un idéal de l’amour comme la solitude à plusieurs dans un monastère est un idéal religieux. « Une île / Et qu’il nous reste à bâtir / Mais qui donc pourrait retenir / Les rêves que l’on rêve à deux »
► CHARPENTREAU J., « L’arbre ».
« Perdu au milieu de la ville, / L’arbre tout seul, à quoi sert-il ? [...] / Il suffit de le demander / A l’oiseau qui chante à la cime. »
► ELUARD P. / MAN RAY, « Solitaire », Les Mains libres, 1937.
L’artiste surréaliste a besoin de l’autre et de l’amour pour être et pour créer. « Qui peut vivre seul / Sans toi / Qui ».
► FERRE L., « La Solitude », 1971.
Chanson qui a donné son titre à l’album La Solitude.
► FOMBEURE M., « Solitude », Greniers des saisons , 1942.
La solitude paradoxale dans la ville et dans la foule : « Je marche sans arrêt / Dans cette énorme ville [...] / Je marche sans arrêt / Perclus de solitude / Dans ces déserts mortels / Tout luisants de regards ».
► HOUELLEBECQ M., « Isolement »
« Où est-ce que je suis ? / Qui êtes-vous ? / Qu’est-ce que je fais ici ? / Emmenez-moi partout [...] / Dites-moi qui je suis / Regardez-les mes yeux / Êtes-vous mon amie ? / Me rendrez-vous heureux ? » Mis en musique par Jean-Louis Aubert (2014)
► HOUELLEBECQ M., « Le train de Crécy-la-Chapelle », La Poursuite du bonheur, 1997.
La solitude de l’adolescent qui n’a pas de succès avec les filles : « Je n’osais pas danser, je n’osais pas partir, / Personne ne m’embrassait. Je me sentais bien seul. »
► HOUELLEBECQ M., « L’amour, l’amour », La Poursuite du bonheur, 1997.
La solitude sexuelle : « Juste une solitude aggravée par la joie / Impudique des femmes / [...] / Je m’adresse à tous ceux qu’on n’a jamais aimés, / Qui n’ont jamais su plaire ; / Je m’adresse aux absents du sexe libéré. »
► HOUELLEBECQ M., « Il est vingt et une heures... », La Poursuite du bonheur, 1997.
La solitude suicidaire : « S’il y a quelqu’un qui m’aime, sur Terre ou dans les astres, / Il devrait maintenant me faire un petit signe. / Je sens s’accumuler les prémices d’un désastre, / Le rasoir dans mon bras trace un trait rectiligne. »
► JUARROZ R. (1925-1995), Poésie verticale
« Je pense qu’en ce moment / Personne peut-être ne pense à moi dans l’univers. » Poète de la verticalité. De haut vol.
► KINET M., « Berceuse à voix tue », Poésie.
Poétesse sur le tard (1948-1996), d’une grande exigence poétique. A découvrir.
► LAMA S., « Je suis malade », 1973.
« Je n’ai plus envie de vivre ma vie / Ma vie cesse quand tu pars [...] Je suis malade complètement malade / Comme quand ma mère sortait le soir / Et qu’elle me laissait seul avec mon désespoir ».
► MARJANE L., « Seule ce soir », 1942.
« Je suis seule ce soir / Avec mes rêves, / Je suis seule ce soir / Sans ton amour. [...] Je suis seule ce soir / Avec ma peine / J’ai perdu l’espoir / De ton retour ».
► MOUSTAKI G., « Ma solitude », 1966.
La solitude « amie », « complice », même si le chanteur « préfère l’amour / D’une autre courtisane ». « Non, je ne suis jamais seul / Avec ma solitude ». Chanson interprétée par Serge Reggiani.
► NORGE, « Iles désertes »
Poète (1898-1990) : « Brusquement il comprit qu’il était une île déserte. Au secours ! hurla-t-il. Mais pourquoi appeler puisqu’il n’y a personne ? Oui, quelquefois au loin, une autre île déserte et qui crie au secours. »
► PREVERT J., « Déjeuner du matin », Paroles, 1946.
► ROUD G., Air de la solitude, 1945.
Tout le recueil de ce poète suisse. Beau, style limpide, accessible à tous.
► SICAUD S, « Vous parlez ? »
Poétesse (1913-1928) : « On doit apprendre à souffrir seul. »
Pistes de recherches
► Voir du côté des Baroques noirs
Saint-Amant et l’Agrippa d’Aubigné mélancolique du Printemps beaucoup moins connu que Les Tragiques, la solitude avec folie.
► Chez les Anglais
Des choses magnifiques chez John Donne et surtout dans les chansons pour haute-contre : interprétations récentes et éblouissantes d’Andreas Scholl, ou l’extraordinaire Philippe Jaroussky.
Ce document constitue une synthèse d’échanges ayant eu lieu sur
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postée sur cette même liste. Cette compilation a été réalisée par la
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