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Article : [162] - Faire jouer Dom Juan au lycée


dimanche 11 juillet 2004

Par Anne Fouilloux

Il s’agissait de savoir comment faire « jouer » du théâtre aux élèves tout en les faisant réfléchir à la mise en scène et mise en espace avant d’aborder les classiques extraits de lectures analytiques. Pour cette expérience, le texte de référence était le Dom Juan de Molière et la classe une Première L .
Comment s’y prendre pour perdre le moins de temps possible et que cela soit aussi profitable que réjouissant ? Sélectionner et répartir quelques scènes clés pour balayer la pièce ? Choisir une scène (mais laquelle de préférence ?) et confronter leurs diverses interprétations ?

Synthèse mise en ligne par Corinne Durand Degranges

Réponse n°1 :

J’ai travaillé sur Dom Juan l’an passé et demandé à mes Premières S de proposer une mise en scène du dénouement sous la forme de leur choix et en adaptation classique ou modernisée : ils ont adoré et j’ai obtenu des travaux formidables. Plusieurs mises en scènes écrites (mais avec description de costumes, schéma de déplacement...), un sous forme de roman photo, un autre en théâtre de marionnettes (construit, cousues et jouées avec bruitage !!!) deux « films » avec un Don Juan féminin et modernisé et un plus classique mais tourné en extérieur. Et enfin une version jouée « en direct » façon banlieue (rap et univers du basket US !). Bref que du bonheur !

Réponse n°2 :

  Je te transmets ma toute petite expérience dans ce domaine (c’est la 2e année que je fais jouer mes élèves de Seconde, et je suis bien maladroite, mais déjà cela se passe mieux que l’année dernière !). Je pense que d’autres colistiers te répondront de manière bien plus informée, et j’attends avec impatience leurs réponses et la synthèse.
Je crois surtout qu’il sera difficile d’y passer « peu de temps » (mais est-ce du temps « perdu » comme tu le dis ? En tout cas c’est un réel plaisir pour les élèves et pour le prof), je t’en donne ci-dessous les raisons en essayant de répondre à quelques questions...
  « Le problème du nombre » : combien as-tu d’élèves dans cette classe ? As-tu des modules avec eux ? Es-tu sûre que tu veux faire jouer tout le monde ? Il y en aura certainement qui seront un peu « bloqués » (je ne dis pas que ceux-là ne doivent pas jouer, mais ça peut prendre plus de temps, justement, de les y préparer). Cela pourrait faire gagner du temps de ne sélectionner que les élèves volontaires (si tu veux travailler l’oral avec les autres aussi, tu peux leur proposer de faire « Ã  la place » par exemple un exposé pendant la séquence. C’est ainsi que j’ai procédé en Seconde car j’ai des classes de 34 !.
  Comptes-tu les aider dans leur mise en scène ? Cela me paraît souhaitable, car ils n’ont pas tous d’idées naturellement, il faut quand même les guider : par exemple dans la scène de Monsieur Dimanche, à moins d’être particulièrement doués et « décomplexés », ils auront du mal à en faire « assez » (mouvements notamment) pour montrer comment Don Juan se moque de l’autre, le pousse, le chasse presque ; et il faudra leur rappeler quelques principes de base (ne pas tourner le dos au public...). Or il faut du temps pour voir chaque groupe, au moins deux ou trois fois avant la représentation « définitive », avec une semaine d’écart pour qu’ils aient le temps de « digérer » les remarques, d’apporter des accessoires ou costumes utiles...
A titre indicatif, j’ai voulu voir 6 groupes de 2-3 élèves en 1 heure sur des extraits très brefs du Jeu de l’amour et du hasard, eh c’était bien sûr impossible : j’ai été obligée de réquisitionner des cours d’aide individualisée. D’ailleurs si tu choisis de les aider, et pour répondre à l’une de tes questions, je pense qu’il vaut mieux une formule intermédiaire entre « les scènes clés » et « une seule scène pour tout le monde ».
Mettons que tu aies 10 groupes, je donnerais 5 scènes, chacune étant jouée par deux groupes. Ca permet de comparer les mises en scène, ce qui est évidemment intéressant, mais aussi de varier un peu les scènes, les registres... c’est utile pour l’étude de la pièce, et plus agréable pour les spectateurs ; et surtout si tu les aides, tu auras du mal à leur proposer des choses différentes si c’est toujours la même scène qu’ils représentent : ils risquent de faire 10 fois la même chose (à moins que tu sois beaucoup plus imaginative que moi, ou beaucoup plus douée pour faire émerger leurs propres idées sans les amener en fait discrètement aux tiennes... c’est sûrement possible, mais je n’y arrive pas ! surtout que cela prendrait encore beaucoup plus de temps...).

Réponse n°3 :

Le problème auquel ils seront confrontés, c’est l’apprentissage du texte. Mes Secondes sont de très bonne volonté mais dès qu’une réplique excède quelques lignes, ils ont eu beau la réciter mille fois à leurs parents, devant les autres les trous de mémoire s’accumulent... et il me semble que Dom Juan posera plus problème encore que mon Marivaux pour cela, car les scènes intéressantes comportent souvent de longues tirades (très difficiles à mémoriser, par exemple Sganarelle à la fin de III, 1 qui aurait pourtant été très intéressante à leur faire jouer, avec la « chute » du raisonnement), ou alors des répliques très brèves mais qui s’enchaînent avec une vivacité qui leur posera certainement problème (je pense à II, 4 par exemple : ce serait passionnant à mettre en scène, mais les répliques sont très répétitives, encore difficiles à mémoriser...).

Réponse n°4 :

J’avais étudié cette pièce en Seconde il y a deux ans, et je retrouve dans la couverture de mon édition les 5 scènes que j’avais choisies pour un module sur la lecture à haute voix ; je pense que j’avais dû choisir non pas tant en fonction de « l’intérêt » des scènes qu’en cherchant des scènes brèves, « closes », et un temps de parole à peu près équilibré entre les différents personnages, et en évitant les tirades. J’avais donc choisi III, 2 (le pauvre) ; III, 5 ; IV, 3 (M. Dimanche) ; IV, 7 et V, 3.

Réponse n°5 :

Sinon, pour le travail sur l’Å“uvre, n’oublie pas d’exploiter des vidéos. Il y a notamment le film de BLUWAL, celui de WEBER, l’opéra filmé par LOSEY. Comme j’en ai déjà parlé sur la liste, il peut être intéressant de comparer leur mise en scène du dénouement.

Réponse n°6 :

Michèle Tillard
Je n’ai pas d’idée sur la manière de jouer Dom Juan ; mais je peux vous proposer une séquence sur mon site avec notamment une comparaison entre la mise en scène de MESGUICH et le film de WEBER. Cela peut vous donner des idées (je pense notamment à la « scène du pauvre ».
Par ailleurs, Dom Juan est au programme des prépas scientifiques : il doit y avoir pas mal de choses, notamment sur le site magister de notre collègue Philippe Lavergne.

Réponse n°7 :

La scène entre Don Juan et Sganarelle sur l’infidélité peut être l’objet d’un travail théâtral. Imaginez Don Juan sur une montagne et livrant sa théorie à la terre entière.
Imaginez Don Juan chuchotant son secret à Sganarelle.
Voyez ce qui le rend le plus convaincant ... types de gestes ? Engagement respiratoire ?
Surtout pas de cape et de bottes et de « belle tête » pour le rôle.
Personnellement j’aime bien travailler avec des « ateliers amateurs » sur la première scène d’Elvire, (il y a le couple Don Juan / Sganarelle, et Elvire) en jouant sur le concret de chaque mot : ça donne parfois des choses très surprenantes.

Réponse n°8 :

En général, quand je n’ai pas le temps (ou l’envie de passer par cette mise en place), je fais lire les élèves et on s’arrête pour faire le point sur les enjeux, la manière d’interpréter un fragment qu’on met en place. Des fragments suffisent en effet bien souvent.

Réponse n°9 :

J’ai fait un travail de ce type à propos d’une pièce d’un auteur belge et j’ai mis les réactions en ligne sur mon site.
En ce qui concerne Dom Juan, peut-être pourriez-vous visionner vous-mêmes deux ou trois versions qui existent pour choisir les scènes qui sont traitées très différemment d’une version à l’autre. En ce qui me concerne, j’aime bien les 2 premières scènes qui permettent de confronter
Don Juan vu par Sganarelle et tel qu’il se présente lui-même. La scène suivante avec Dona Elvire est aussi intéressante, ainsi que la scène d’hypocrisie avec Don Luis et la fin : que faire des spectres et du Commandeur ? Choisir une version classique : Don Juan englouti par les forces de l’enfer ou une version plus « rationnelle » telle que celle que propose J. Weber dans son
film ?
J’espère vous avoir apporté quelque aide. J’ai aussi fait quelques pages sur
Don Juan en tant que mythe

Réponse n°10 :

J’ai fait du théâtre avec mes élèves en Seconde et en Première S sur L’illusion comique. Voilà comment j’ai procédé.
  Distribution des scène proposées : 20 vers chacun avec un tableau d’évaluation. Constitution de groupes au choix des élèves. Tu notes quels passages sont choisis et une fois qu’un passage est choisi deux ou trois fois, tu annonces que personne ne peut plus le prendre (comme ça, c’est plus varié).
  Division de la classe en deux groupes qui viendront s’entraîner et mettre en scène. Il y a des modules en L, non ? (en S, j’ai dédoublé une heure).
Ils doivent arriver en connaissant le texte (ça fait gagner du temps et ils peuvent réfléchir à une mise en scène sans le livre dans les mains, donc aussi jeux de regards...). Temps de répétition 2 heures (pas forcément de suite). Tu passes de groupe en groupe et tu les aides à voir les enjeux des scènes, comment jouer, se déplacer, ne pas tourner le dos au public...
Scènes à jouer en milieu ou en fin de séquence plutôt qu’au début pour mieux voir les enjeux.
  Ensuite représentation en classe complète. J’impose un accessoire/déguisement. Tu distribues une grille de notation aux élèves et ils notent leurs camarades. Cela t’oblige à faire un peu de comptabilité à la fin, mais toi tu peux profiter du spectacle sans « te prendre la tête » sur les notes. En général, ça correspond à ce que tu mets.
  Critères :
Situer le passage, quel rôle joue chaque élève /2 (note commune au groupe même su un seul parle)
Par coeur : /5
Intonation, silences éventuellement /5
Gestes, mimiques, déplacement, ne pas tourner le dos au public : /5
Assurance : voix claire, forte, posée pas de rire /3

Réponse n°11 :

J’ai placé une séquence sur WebLettres à propos de En attendant Godot dans laquelle j’explique un peu comment je procède (il y a aussi la séquence sur Le roi se meurt voir séance 8).


Ce document correspond à la synthèse de contributions de collègues professeurs de lettres échangées sur la liste de discussion Profs-L ou en privé, suite à une demande initiale postée sur cette même liste. Cette compilation a été réalisée par la personne dont le nom figure dans ce document. Ce texte est protégé par la législation en vigueur. Fourni à titre d’information seulement et pour l’usage personnel du visiteur, il est protégé par les droits d’auteur en vigueur. Toute rediffusion à des fins commerciales ou non est interdite sans autorisation.

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